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Les tribulations d'une moufette...
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19 avril 2008

Keith Haring : le graphe tonitruant.

free music

            Cet intermède lyonnais fut l'occasion de me rendre à l'une des premières grandes rétrospectives européennes sur Keith Haring, artiste phare de l'underground new-yorkais des années 1980. Direction les abords du parc de la Tête d'Or et le MOCA de Lyon (et ça n'a rien à voir avec le café) c'est-à-dire le Musée d'Art contemporain de la Cité internationale de Lyon. L'ensemble des édifices est une oeuvre en soi, commise par Renzo Piano (vous savez, l'architecte du Centre Georges Pompidou à Paris) et allie avec bonheur à mon goût les briques, les verrières et une façade blanche dans le style des années 1930. L'endroit est donc fort agréable quand il est bien ensoleillé (mais sans doute tristounet par un temps plus couvert ? A voir...) et bien desservi.

M_tro            L'exposition, sur trois étages, ne suit pas un parcours chronologique. Le but est de mettre l'accent sur les différents thèmes abordés par l'artiste, à savoir la volonté de rendre l'art accessible au public, de dénoncer la nature de la société de consommation, d'évoquer aussi l'espoir résidant dans les relations entre les hommes, la peur de la mort, la souffrance, l'apocalypse. On ne s'ennuie pas un seul instant, on plonge simplement de plus en plus profondément dans une oeuvre d'une grande intensité malgré la simplicité apparente des graphismes : vous entrez dans l'univers de Keith Haring. Street art et rap des années 1980, art tribal et graffiti, dessins à la craie sur les panneaux du métro, sur les murs... Silhouettes, chien aboyant, bébé radiant ou encore Mickey Mouse, parfois d'envahissants pénis ou des artistes de l'époque (Grace Jones) apparaissent sur des supports extrêmements variés. Humour toujours, mais lucidité poignante aussi. Andy Warhol (mentor et ami) n'est pas loin, mais c'est la personnalité de Keith Haring qui s'exprime dans ces oeuvres, rien d'autre. 

Mickey     Soci_t__de_consommation

            Technique, nucléaire, télévision et Mickeymouse-isation envahissant la vie dans les années 1980. Ou encore un monde où l'argent est roi et dévore chacun. Réflexions bien contemporaines...

Arbre   Mural


Grace_Jones            Au fil de l'oeuvre, les traits s'affinent, le message s'assombrit : des croix barrent les personnages, annihilant les êtres et symbolisant la maladie et la souffranceSaint_S_bastien ; les prêches des télévangélistes sont dénoncés. Et le visuel se fait plus violent : questionnement sur le SIDA, sur la part croissante prise par la technique et la télévision dans nos esprits. Parallèlement, Keith Haring multiplie les interventions in vivo, déployant une activité étonnante : adepte fervent de l'art à la portée de tous, il crée sur tous les supports et dans tous les lieux (le mur extérieur d'un presbytère à Pise, un mur de banlieue à Philadelphie, des couloirs d'hôpitaux ou celui d'un cabinet de gynécologie du pavillon Princesse Grace de l'hôpital de Monaco, des lieux de réunions dans des ghettos de grandes villes américaines...), allant jusqu'à fonder le "Pop Shop Tokyo" qui permet à tous d'acquérir un peu d'art, badges, T-shirts et autres produits dérivés, vendus pour des causes importants (enfance, SIDA...).

            Bien sûr, son oeuvre offre aujourd'hui matière à spéculation sur le marché de l'art, mais il faut dépasser cette vision de "mort jeune = enchères qui montent", et aller voir l'exposition : par-delà l'aspect bon enfant du tracé et des couleurs, une rage habite Keith Haring qui dénonce un monde peu lucide, une société de consommation dévorante et avilissante, et aspire à ce que l'individu prenne conscience des dépendances qui le lient et le contraignent.
            Une comète artistique rafraîchissante, trop tôt disparue.

SIDA

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