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Les tribulations d'une moufette...
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21 mai 2008

Cuba : le reliquaire castriste de l'Amérique des Fifties.

            Cuba, enfin !!!Carte_Cuba

            Préparez-vous, parce que c'est du lourd : des articles tellement énormissimes que vous allez devoir sortir les bésicles pour les lire, et tellement hyper condensés que ton taux de concentration va dépasser celui du sucre dans le Coca-Cola. Oui, je suis en forme : 500 caractères de chinois, ça te réveille une moufette !
            Quelques données préalables tout d'abord pour être bien sûr que l'on parle de la même chose : cette île située dans la Caraïbe a la forme d'un crocodile, long de 1 000 km et large d'environ 200km, avec une chaîne de montagnes dans le sud qui culmine à 1 900m. On ne ricane pas au fond, c'est important pour la suite... Tsss...

            L'arrivée à Cuba est un pas dans un autre monde : les structures métalliques de l'aéroport sont rouges. Et l'aéroport s'appelle José Marti, un des grands héros de l'indépendance cubaine de 1898. Vous le verrez partout. Vraiment partout, à l'instar de deux autres visages que l'on voit absolument partout : Ernesto "Che" Guevara et Fidel Castro. Parce que l'on vit ici évidemment à l'ère de la Révolution, toujours en marche, de la gloire cubaine, du non-alignement de l'île sur... quoi que ce soit d'ailleurs. Le castrisme se veut bien portant, se montre tel, au contre-exemple de son inspirateur Fidel Castro qui s'éteint progressivement ; sa relève guette, précédée par le frère Raul et les fidèles lieutenants. Pendant ce temps, le pays continue de vivre socialistement : et c'est important, parce que concrètement, en tant que touriste vous en verrez et en subirez partout les avantages et les inconvénients.
            Les premières choses que le touriste remarque le long de la route conduisant de l'aéroport à La Havane, ce sont les dizaines de personnes marchant le long des routes ou faisant du stop, les maisons austères, semblables mais "en dur" de la "banlieue" et enfin, l'absence absolue de panneaux publicitaires. CheDans les villes comme dans les campagnes, il n'y en a vraiment aucun (pour tout dire, même en Birmanie, il y en avait plus...) : la publicité est remplacée par des affiches toutes différentes à la gloire du peuple cubain, du Parti, de Castro et surtout de l'inestimable, omniprésent et divinisé Che Guevara. D'un point de vue visuel, j'avoue que c'est un très agréable soulagement que JCDecaux ne soit plus sous mes yeux ; humainement, la propagande et le lavage de cerveau font rire, ahurissent (si ce verbe est transitif) puis agacent : les slogans sont porteurs de valeurs qui souvent me sont très chères, de plus elles me permettent de faire progresser ma pratique de l'espagnol comme ma compréhension des ressorts de la propagande castriste également (quand vous arrivez dans n'importe quel hameau, vous êtes accueilli par le panneau du comité populaire du coin...). Mais les icônes... au bout de trois images répétant sempiternellement les mêmes traits, les mêmes yeux tournés vers l'avenir, vous avez peur : Cuba s'est-elle figée dans le culte de la personnalité ? Oui, c'est un premier point bien établi, vous LE verrez partout. Le leitmotiv du Che est un moyen aisé pour soutenir la propagande castriste, au détriment des réalités peu glorieuses de l'histoire de Guevara, icône pratique pour Castro car 1) le Che est mort, donc plus facile à diviniser ; 2) la photo retouchée qui a fait le tour du monde le présente sans aucun doute sous son meilleur jour, et sous le meilleur jour qui soit pour camper le révolutionnaire aspirant à un avenir meilleur pour l'humanité.
            Parmi tous ces panneaux et slogans, sur la révolution, contre le blocus américain, pour le bien de l'humanité, la révolution énergétique ou l'éducation comme priorité, j'ai eu beaucoup de mal à choisir le panneau à vous montrer : j'en ai 448 en photo... Mais le plus beau est sans aucun doute ce "Vamos bien !" (Nous allons bien !) clamé à la face du monde :

Vamos_bien

            
Magasin            Autre aspect éminemment lié au castrisme, c'est l'absence d'approvisionnement de l'île : à l'exception des quelques chaînes hôtelières étrangères installées sur les plages et autorisées au compte-goutte par l'Etat à s'approvisionner par elles-même (mais vous en saurez plus dans l'article sur la gastronomie cubaine), vous ne trouvez RIEN. Bien seule depuis la chute du Grand Frère soviétique, Cuba tente de subsister, de produire ses propres denrées et biens de consommation tout en justifiant le manque par le refus de la société de consommation... Il est évident que le blocus américain, bien soutenu par le lobby cubain grassement installé en Floride, n'arrange pas du tout les choses, et la vie quotidienne des Cubains s'en ressent : vous ne trouverez donc à Cuba absolument aucun magasin de marque étrangère, presque aucun magasin d'ailleurs (et quand il y a un, les vitrines et les rayons sont vides) si ce n'est quelques boutiques de tableaux pour les touristes. Absolument rien d'autre. Aucun artisanat ou très très très rare. Et les prix ne sont pas bon marché, évidemment, vues les difficultés pour s'approvisionner : alors, si c'est pas donné pour une touriste, qu'en est-il pour les Cubains !!!
            Ici, le revenu moyen est de 15€ par mois... mais attention, il faut considérer ce que cela représente réellement : je pense qu'il s'agit ici en réalité de "l'argent de poche". Je m'explique : les "avantages" d'un Etat socialiste (ou du Qatar, mais c'est une autre histoire) sont de fournir à ses citoyens éducation et santé gratuits, tout comme le logement (et j'imagine l'eau et l'électricité : d'ailleurs, concernant celles-ci il semble que toutes les maisons en soient pourvues) et une partie des repas si l'on travaille. Le problème est donc de trouver du travail... L'habitat est bien plus salubre et correct que dans nombre d'autres pays, et l'on ne peut même pas parler de quartiers "pauvres" ou "riches" puisque tout le monde a le même niveau de vie, le même type de logement ; seuls peut-être les quartiers historiques sont un peu différents. Pour changer de logement à Cuba, pas d'achat, de vente ou de location : on laisse une affichette où l'on explique que l'on veut permutar : "j'ai un trois pièces au deuxième étage, je cherche un quatre pièce à n'importe quel étage. Qui peut échanger ?". Cela rappelle les kibboutz, mais à une échelle de 11 millions d'habitants... Enfin, pas du tout de banlieues, pas de longue étendue urbaine : on passe directement des logements et des rues du centre à la campagne. très étonnant, le communisme sans l'urbain : un peu comme au Laos...
            Ainsi, la population n'a pas l'air en très grande détresse physique, les gens se portent même très bien en terme de poids, et Cuba est en train de devenir une destination majeure du tourisme médical (spécialisé dans l'ophtalmologie) tout comme elle envoie ses médecins gratuitement aux pays amis qui en ont besoin (Haïti). Pour les prochaines années et une réintégration du monde libéral, l'industrie pharmaceutique est une des voies à privilégier, car l'île est déjà très bien placée en cette matière (recherche scientifique, hautes compétences) et pourrait permettre un développement de qualité sans passer par les écueils qui guettent : prostitution, drogue, jeux, armes...Cariole

          Concernant la vie du touriste ici, voici quelques informations : pour se déplacer et faire en sorte de voir un peu plus que La Havane, il faut louer une voiture et ne compter ni sur les bus locaux (assez chers) ni sur les trains (quasi non utilisés pour les personnes). Quant aux autres moyens de transports, ils sont majoritaires ici et vous les croiserez sur votre route : calèches, carrioles tractées par des boeufs ou des chevaux, cyclopousses. Et attention, ici, cela n'a rien à voir avec une quelconque attraction touristique, puisque les touristes n'ont pas le droit de les prendre... Explication : Cuba fonctionne selon un subtil système de double monnaie, les touristes payant en CUC (peso convertible), tandis que les Cubains payent en CUP (peso non convertible). Cela n'a aucune incidence pour le touriste, sauf que les Cubains essaient le plus possible de se procurer des CUC plus intéressants. Le conducteur paye sa licence à l'Etat en CUP, donc il ne peut être rémunéré en CUC sinon il s'en mettrait plein les poches ! Et ça, ça craint... Voici donc sans doute le seul pays où, hors de La Havane (ville où le tourisme est roi), les calèches, carioles et cyclopousses sont exclusivement réservés aux locaux. Mention spéciale ici aux voitures : à Cuba, les rares automobiles récentes sont celles de location, pour les touristes ; les autres sont des taxis collectifs et se matérialisent en de superbes voitures américaines des années 1950, bichonnées, soignées, magnifiques... On passerait des heures à les admirer, j'avoue avoir un faible pour les bicolores ; vous pouvez en acheter une, mais pas la sortir du territoire puisque Fidel les a déclarées patrimoine national !

Voiture     Voiture_4    Voiture_6

Voiture_2    Voiture_5     Voiture_3

Carriole            Quant aux Cubains, ils se déplacent donc essentiellement à pied, le long des routes, afin de rallier un point de passage (ce qui explique ce que j'avais vu sur la route de l'aéroport) où ils feront du stop : aux carrefours, sous les ponts, pour trouver un bus (peu nombreux), un camion, un taxi collectif ou une rare voiture particulière. Mais ils ne seront pas seuls : non contents d'être toujours une vingtaine, ils sont accompagné d'une "préposé au stop" (habillé de jaune) qui tient le registre des arrivées d'auto-stoppeurs et arrête les voitures et camions pour leur imposer de prendre un auto-stoppeur. Oui, vous avez bien lu : nos voyages en France comme en Europe pourraient s'organiser bien plus simplement avec cette méthode...

Autoroute            Enfin, un point Bison Futé est nécessaire : les routes cubaines... Hum... Vous serez obligés de les éprouver pour visiter l'île, les "éprouver" j'ai bien dit. Nous avons fait plus de 2000 km pendant ce voyage et nous avons vu les pires autoroutes et routes nationales que nous ayons jamais vues (et pourtant : nous avons tous quatre beaucoup voyagé... Seule une route birmane me paraît du même calibre...). Les autoroutes ont été construites sous Battista dans les années 1950 : 1) cela rappelle à quel point à cet époque Cuba était en passe de devenir un Etat américain supplémentaire ; 2) elles n'ont pas été retouchée depuis sauf pour boucher de temps à autre un bache, nid de poule. Sauf que ces revêtements se chevauchent, les camions et bus roulant à toute vitesse en ont détaché des bouts, et qu'il s'agit maintenant de nids d'autruche...
Autoroute_2            Prendre l'autoroute est donc une aventure fort sympathique : vous y serez désespérément seul, avec votre voiture ; autour de vous, de loin en loin, une carriole en sens inverse ; des boeufs traversant la route ; des auto-stoppeurs. Souvent la double voie n'existe pas et la voie contraire disparaît : aucun panneau ne vous le signale, votre voie s'arrête tout à coup et vous devez tant bien que mal basculer sur la voie de gauche. C'est super fou. Le plus beau tronçon est sans aucun doute situé à Santiago de Cuba : l'entrée dans l'autoroute est splendide, des bosquets, des fleurs, une double voie avec chacun son sens pendant... 50 mètres. Après on revient à l'autoroute à la cubaine. Les routes nationales sont correctes (la carretera centrale traverse heureusement le pays presque en entier), mais nombreux sont les nids de poule et les problème de revêtement ; pour finir, certaines routes sont dans un état bien pire que les pistes africaines (et pourtant, j'étais avec deux connaisseurs du continent africain) du fait du revêtement goudronné : 16km en 1h30, sans savoir comment les essieux, les amortisseurs et mes cervicales ont tenu le choc. Effectivement, l'emploi du cheval est fortement conseillé...

Florida            Concernant les hôtels et les restaurants, on se retrouve aussi devant les conséquences de la main-mise de l'Etat. La Havane, toujours, est à part : le tourisme y est un peu plus visible qu'ailleurs (la plupart des groupes y font une pause, puis vont se dorer la pilule sur les plages), et quelques très belles maisons coloniales ont été restaurées avec beaucoup de goût et accueillent les touristes pour une somme assez rondelette tout de même (70€ à deux) ; c'est évidemment la meilleure manière d'être au coeur de la ville et bien logés. Quelques grands hôtels comme le "Nacional", des années 1930, est dans le même ordre de prix. Et pour le reste, il faut aller dans des pensions, ou casa particular, tenues par des Cubains. Eux ont tout intérêt à les remplir, parce qu'ils payent une taxe à l'Etat très élevée quelque soit le remplissage, et pour le touriste c'est l'occasion de contacts bien plus chaleureux et intimes avec la population. Même chose pour les restaurants H_tel_Melia: le restaurant du grand hôtel de la ville ("grand hôtel" qui se résume parfois à un deux étoiles soviético-vieillot : mais c'est tellement plus drôle !) mal approvisionné et décevant par son no hay récurrent, et les paladares, restaurants privés autorisés depuis quelques années et qui sont des tables d'hôtes. Nous avons essayé la formule, 18 CUC le dîner (salade, riz blanc, grillade de la mer dont langouste congelée sans aucun doute malgré les dénégations..., café et ananas) : un peu décevant du point de vue gustatif, mais très enrichissant du point de vue humain. On pose des questions sur la vie quotidienne, les enfants, le travail, la fréquentation du lieu...


H_tel_Melia   H_tel_Melia_2

Ben oui : on ne s'en fait pas !!!

                       Quant aux touristes... Que dire...
            Vous en verrez quelques-uns à La Havane, en groupes parfois, par deux ou trois parfois ; vous sortez de La Havane : vous n'en verrez plus aucun, sauf si vous allez sur les plages du Nord où sont concentrés les stations balnéaires tout compris, deux en un (plage+nourriture). Vous pouvez tenter cette expérience, je l'ai fait moi aussi dans deux stations, à Guardalavaca ("Garde la vache" : mouahahaha, j'adore !) dans un complexe touristique 4* pas mal, puis à Cayo Santa Maria dans un 5*. Oui, on ne s'en fait pas. Dans le premier, vous passez votre temps à maudire les gamins qui hurlent dans la piscine, qui vous empêchent de siroter votre fade cocktail gratuit et vous lisez, vous mangez (tout est compris, donc tout est gratuit et à volonté). Dans le 5*, vous faites la même chose mais en plus sélect : celui que nous avions choisi était interdit aux moins de 18 ans... Tranquilité, spa et massages, buffets gigantesques (un peu mieux approvisionnés, chaîne hôtelière étrangère oblige !), piscineS (oui, plusieurs), plage splendide, restaurants. Tout est ceci est idéal pour se repose, se resourcer, rencontrer l'âme soeur peut-être mais en tout cas rencontrer des Canadiens (ils forment le premier contingent de touristes à Cuba, car eux, à la différences des Américains, ont des vols directs pour l'île et n'ont pas la Floride pour les plages...). Avantage certain de la présence des Canadiens et du personnel cubain : personne n'est mince, donc on oublie son poids... Tout cela va bien deux jours ; non, trois jours plutôt. Puis, on s'ennuie. Et on se dit que tous ces gens ne sauront absolument rien de Cuba en repartant. Et c'est bien dommage.

            Car ceci doit être dit : cette île est exceptionnelle, historiquement, politiquement. J'en parlerai dans quelques jours, mais les paysages sont sublimes, les villes coloniales assoupies et splendides, les petits villages plein d'intérêts. Et ce pays est très... loufoque, sur un grand nombre de points.
            Faites vite, allez-y avant que la main ne passe à d'autres, plus réalistes politiquement sans doute (et la population pourra souffler un bon coup pour sa liberté politique ; qu'en sera-t-il des conditions de vie, en revanche : je ne suis pas sûre qu'elles aillent en s'améliorant, en tout cas au début...) et surtout avant que les Américains n'y mettent le pied. Car sans verser dans l'anti-américanisme primaire, le risque est là : quand Castro aura définitivement passé dans l'autre monde, les Etats-Unis feront tout pour régler le différend territorial qui les oppose à l'île et reprendre pied fermement par des achats immobiliers, des installations, un mode de vie et un mode d'être qu'a déjà connu l'île, lorsqu'elle était le "bordel" des Etats-Unis au milieu du XXème siècle.

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Commentaires
C
@ Jelaipa : effectivement, "Freza y chocolate" est très connu, comme son réalisateur. Mais le premier m'a l'air très chouette : je vais m'empresser de me les procurer !!! Merci pour l'info !
J
J'ai retrouvé 2 des 3 films:<br /> Mon préféré à l'humour noir : "Guantanamera" de Tomas Gutierrez Alea et Juan Carlos Tabo et qui date de 1995<br /> <br /> Le plus connu sur l'homosexualité : "freza y chocolate" de Tomas Gutierrez Alea<br /> <br /> Je suppose donc que le 3ième est du même auteur.Mais il ne m'a pas marqué puisque même en regardant les synopsis de ses films, la mémoire ne me revient pas....
C
@ Jelaipa : merci beaucoup, je te dirai le jour où j'ose me lancer... En revanche, ces petits films m'intéressent bien, je vais essayer de trouver ce que c'est et je te dirai les titres trouvés : peut-être que tu pourras me dire si c'est ceux-là ?<br /> <br /> @ LaSof : ahhh, je savais que les vieilles voitures te plairaient ; en revanche, tu n'as pas tort: j'ai peu de photos de Cubains mais quelques-unes quand même, je mets un article dans quelques heures là-dessus ! Mais aucun torse nu...
L
Je confirme les dires de jelaipa, alors je répète pas... J'adore les vieilles voitures, par contre je peux râler, ou qui SONT LES CUBAINS? me dis pas que tu as pas pensé à moi et que tu en as pas pris un seul en photo???
J
de nous faire voyager et découvrir un pays avec autant de sensibilité et d'intelligence.Si tu ne sais pas quoi faire, écris des récits de voyages....j'achète de suite!<br /> Il y a une dizaine d'année ont été diffusé en France 3 petits films (dont je ne me souviens plus les titres), mais qui, d'après les connaisseurs du pays, reflétaient bien la réalité de la vie cubaine.<br /> Je me souviens entre autre du transport d'un corps à travers le pays, d'un humour noir délicieux...
Les tribulations d'une moufette...
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